tout va bien * nar l'illetré

aujourd'hui est une belle journée. les oiseaux chantent, les fleurs commencent de pousser, et les escrocs comme toi marchent librement dans la rue avec l'esquisse d'un sourire heureux. le programme matinal à la radio a annoncé une belle météo pour le début du printemps, presque pas d'averses et une chanson pop appréciée. tu te sens en contrôle. tu gères la situation et tout va sûrement très bien se passer car après des années de malchance et de magouilles tu ne mérites plus que du bonheur et des magouilles réussies, tu en es intimement convaincu. tu as même assorti ta cravate au bleu pâle du ciel alors que tu te levais de bonne heure (mais certainement pas de bonheur car la journée a beau être belle, le lit l'est encore plus au réveil).

tu fredonnes un air populaire en t'installant dans ton bureau, qui reste désespérément vide pendant bien trop longtemps, avec uniquement les réseaux sociaux pour t'occuper. tu postes quelques nouvelles informations sur le site de l'agence, et quelques photos de ton chat sur un compte à part, un peu exaspéré de voir qu'il récupère plus de like que toi. ah, il faut que je rachète du vermifuge pour Pon, en rentrant.

heureusement, un client vient briser la monotonie qui commence à s'installer. c'est le moment de sortir ton sourire le plus professionnel possible avec un ton de télé-conseiller gâché par ton accent campagnard.

─ bienvenue à l'agence, que puis-je pour vous ?

... un jeune. c'est toujours un peu décevant, car ils n'ont jamais beaucoup de moyens pour payer, mais tu n'es pas en situation de refuser, il faut bien se nourrir ! alors tu écoutes plus ou moins attentivement son histoire en réfléchissant à ce que tu comptes cuisiner ce soir en rentrant et s'il faudrait aussi passer chez le poissonnier après ton passage chez le vétérinaire, puisque c'est un jour de promotion sur le saumon. comme en mode auto-pilote, une fois que plus aucun son ne sors de sa bouche, c'est à ton tour de parler, avec un air mystique, quoi que cela veuille dire. en général, tu l'interprètes par des sourcils froncés et un regard faussement concentré.

─ mmh, intéressant... en effet, vous n'arrivez pas à trouver de petite copine car un esprit vous hante, je le vois à ce moment même perché sur votre épaule ! laissez moi l'exorciser.

Ce bourdonnement, rare fut les fois où il parvenait à mes oreilles. Sa mélodie constante me donnait l'impression qu'elle pénétrait mes oreilles dans le seul but d'exploser mes tympans. Bien évidement, ce n'était pas possible pour un mort de perdre l'ouïe, n'est-ce-pas? Pourtant, à chaque fois que cela arrivait, je subissais un réel supplice. Machinalement, je posais mes deux mains sur mes oreilles comme pour essayer de faire barrage à ce grincement aiguë. Impossible. Je serrais des dents, fermant les yeux pour finir par me recroqueviller sur moi-même affaiblit par la douleur. Dans ma tête, des images défilaient, des images que je n'aurais pas voulu voir. Ces images me terrifiaient, je voyais du sang, je m'entendais crier, non, j'hurlais contre quelqu'un, l'invectivait. Je voyais mes mains se poser sur lui, mes coups tomber lourdement sur son corps, sur cet homme qui semblait n'avoir rien demander, cet homme que je venais de croiser.
Comme si j'avais retrouvé ma faculté à respirer, j'étais essoufflé. Machinalement mes mains s'étaient crispées sur ma poitrine incroyablement douloureuse. Qui était-il? Rapidement, je me tournais pour voir la figure présente dans mes souvenirs s'éloigner. A ce moment, je me fichais de savoir qu'on me passait encore au travers, il était plus important, il était une figure de mon passé et peut être avait-il des réponses. La suite se passa très vite et sans même avoir pu réaliser, je m'étais levé pour le poursuivre.
Cet homme que j'avais croisé et qui m'avait semblé inconnu me guida jusqu'au quartier de la ville que je redoutais: les CDC. J'avais par le passé ressenti la même sensation que précédemment lorsque j'avais exploré cette partie de Polaris. La tension que je ressentais dans ce lieu m'était insupportable au point de la fuir du mieux que je pouvais cependant, aujourd'hui, je ne reculerai pas. L'idée qu'il puisse avoir un lien important avec moi était conforté par la tension que je ressentais à présent. J'en étais persuadé, il avait des réponses. Cette fois-ci, je ne reculerai pas! J'allais même jusqu'à le suivre jusqu'à ce qui semblait être son lieu de travail, me permettant de faire le tour du propriétaire jusqu'à être interrompu par un client. Je me postais aux côté de ce vieil homme écoutant ce que son soit disant client avait à lui dire. "Qu'est-ce qu'il faut pas entendre!" Grognais-je à sa réponse. "C'parce qu'il a une tronche de cul qu'il trouve pas d'meuf, Ducon!" Grognais-je en pointant son client du doigt.