first time || pv Nar

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nar & aedan

L'inquiétude pouvait se lire dans tes yeux. Pourtant, tu y pensais depuis longtemps déjà, et même si tu n'avais pas encore sauté le pas, il était temps. Tu ne te sentais pas particulièrement prêt, parce que tu savais qu'on ne l'était jamais véritablement pour ce genre de choses, mais tu voulais le faire. L'idée te trottait dans la tête depuis un bon moment, tu allais le faire ce soir. Ton regard dans le miroir de ta salle de bains, tu t'approchas un peu plus pour retirer ces lentilles qui cachaient la couleur de tes yeux, pour laisser ce gris envahir tes iris. C'était une teinte aussi belle que triste, puisqu'elle résultait d'un accident. Cependant, tu ne pouvais t'empêcher de la contempler à chaque fois que tu la voyais, parce qu'elle était la preuve que tu avais failli passer de l'autre côté, que tu avais failli mourir. En soi, c'était un souvenir morbide, mais très important pour toi. Tu te perdais dans cette contemplation, pourtant, cette différence qui effrayait les autres, tu ne l'aimais pas, elle t'enfonçait dans un monde de solitude que tu ne voulais pas.

Au bout de quelques minutes, tu pris une grande inspiration, pour ensuite ranger tes lentilles marron dans leur étui propre et nettoyé au préalable, replaçant tes énormes lunettes sur ton nez fin. C'était le grand soir, comme le plongeon de toute une vie, une phase qui changerait sans doute ta vision du monde, mais qui était nécessaire à ton existence. Tes pas se dirigèrent dans le salon, où tu poussas la table basse, pour pouvoir installer le nécessaire. Un cercle de sel, des bougies, ta planche ouija avec la goutte au milieu, tu te placas au centre de ce que tu avais tracé, et commença à te sentir anxieux. Tu fermas les yeux quelques secondes, histoire de calmer ton esprit qui semblait contre cette idée tordue. Tu en avais besoin. Tu devais le faire, ce n'était qu'une question de temps avant que tu ne te décides à le faire, et ce soir, c'était le grand soir justement. Tu placas donc tes deux mains sur la goutte, en ayant conscience que normalement, il était fortement déconseillé de pratiquer ce rituel seul. Tu n'avais pas peur, plus grand chose ne te surprenait, ou t'angoissait au point de ne pas dormir, ou de te poser un milliard de questions. C'était sans doute un sentiment qui avait disparu depuis des années, mais tu ne trouvais pas ça mal, au contraire, cela te permettait de voir les choses sous différents angles. La peur ne t'aveuglant pas, tu récitas de ta voix grave mais naturellement hésitante les premières phrases, pour invoquer n'importe quel esprit. Tu savais qu'on pouvait te tromper, mais tu resterais sur tes gardes, bien que ton enthousiasme prendrait sûrement le dessus sur ta prudence, comme toujours. Les premières minutes furent très silencieuses, seule ta respiration perturbait le flux de gaz autour de toi. Tu réfléchissais à toute vitesse, patientant calmement, jusqu'à ce qu'il se passe quelque chose. Tu espérais que ta première séance de ouija soit concluante, mais tu ne te faisais pas trop d'illusions. C'était quelque chose de difficile à faire, cela n'avait rien de vraiment étonnant si tu n'y parvenais pas. Avec un petit sourire las, tu te demandais si tu avais prononcé les bons mots, dans le bon ordre, si tu avais respecté les conditions pour pratiquer ce rituel. Un petit frisson parcourut ton dos alors que tu redressas ton dos, assis sur le sol en tailleur.  « Y a-t-il quelqu'un dans la pièce, avec moi ? »

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Se balader dans le quartier riche était pour moi comme une visite au musée. Des bâtiments monumentaux habillaient le paysage, sublimant les rues les plus propres de la ville. On pouvait clairement voir le contraste entre les Clématis et l'autre partie de Polaris. Cela me donnait l'impression d'avoir pénétré dans un nouveau monde, un monde parallèle où la sacralité du lieu était rappelée par la richesse historique qui se dégageait des bâtiments traditionnels. Les façades des immeubles dit modernistes quant à eux construisaient le paradoxe de ce lieu et bien que l'ornementation en était absente, l'aspect lisse et les matériaux employés nous rappelaient qu'ici demeurait les puissants. C'était beau, chic ce qui d'après mes vêtements m'indiquait qu'ici, je n'étais pas à ma place. Je me sentais comme un éléphant dans un magasin de porcelaine: pas à ma place. Cependant, en cette nuit de printemps, mes pas m'avaient guidés jusqu'ici. Etait-ce le fruit du hasard? Allais-je recontrer un de mes paires? Ou l'ennuie qui m'habitait avait-il décidé qu'il était à présent temps de se cultiver?
Arpentant les rues la tête levée vers le ciel, je ne rêvais pas d'atteindre la dite lumière que les guides tentaient de nous faire convoiter. Je m'extasiais plutôt sur les volumes et le vertige que certains immeubles construits par des architectes de renoms inspiraient aux curieux comme moi. Quelle drôle de sensation, ce vertige. Un sentiment inversé car bien que mes pieds touchaient terre, j'avais l'impression que je pouvais tomber dans l'immensité du bleu de la nuit afin de rejoindre les étoiles. Quel vision bien trop romantique! Comme si c'était quelque chose de possible pour moi! J'étais un cas désespéré... un déchet... A cette idée, mes lèvres se pincèrent. Cette idée me semblait bien trop familière. Pourquoi? Avant même de pouvoir me plonger dans ce genre de réflexion ennuyeuse, je sentais quelque chose en moi. J'avais l'impression d'être appelé. Un proche? Quelqu'un? Sans même réfléchir, je me laissais guider par cet appel, pénétrant dans un bâtiment proche de ma position. J'entendais une voix, me laissant porter par cette dernière pour enfin arriver dans un duplex. Là, au centre d'une immense pièce se tenait un garçon assis en tailleur. Me parlait-il? Je m'avançais jusqu'à lui m'arrêtant au niveau du cercle de sel qui semblait le protéger. Je regardais ce que cet individu faisait avant de reconnaître un objet que j'avais déjà vu auparavant: une tablette ouija. Quel imbécile! Je roulais des yeux, me disant qu'il devait être bien inconscient pour s'adonner à ce genre de pratique seul. Cependant je voyais dans ce spectacle un moyen de m'amuser de ce vivant stupide. Doucement, je me penchais à ses côtés pour guider sa goutte vers une réponse affirmative. Oui.

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Ce petit sentiment d'avoir une autre présence dans la pièce, tu la ressentais en ce moment. Comme si l'air venait de changer, tu regardas autour de toi avant de te décider à poser des questions. Par quoi commencer ? Une question toute bête, pour te prouver que tu n'étais pas fou, que ton sixième sens commençait réellement à se développer. Tu te redressas, comme un piquet planté dans le sol, ton impatience pouvait se ressentir dans tous les muscles de ton corps tendu et penché un peu en avant. Tu ne devais pas lâcher la goutte, pas avant d'avoir fini ta petite séance, pas avant avoir prononcé les mots pour se protéger des possessions, ou d'apparitions maléfiques. En soi, quelque chose d'assez stupide, parce que tu jouais avec la mort elle-même en ce moment, et ce n'était pas une phrase qui allait te protéger si jamais on décidait de prendre ton corps pour une marionnette ou de te tuer dans le miroir la prochaine fois que tu verrais ton reflet. Sans doute qu'il était impératif pour toi d'arrêter les films d'horreur, mais tu aimais ça, plus que de raisons. Alors ta voix résonna dans le silence lourd de la pièce. Tu étais quasiment certain de ne pas être seul, d'être observé, de ressentir un petit tu ne savais quoi d'inexplicable autour de toi. Et ce n'était pas la peur qui te rongeait, non, mais l'excitation de pouvoir découvrir de nouvelles choses. Des choses qui te touchaient tout particulièrement. Au sens psychologique du terme.

Alors que ton coeur battait de plus en plus vite, tu retins ton souffle quelques microsecondes lorsque la goutte se déplaça lentement vers la réponse oui. En soi, elle aurait pu bouger vers n'importe quel mot, n'importe quelle lettre que tu en aurais été aussi ravi. Cela prouvait que tu n'étais pas encore totalement fou et que l'un de tes sens était bel et bien en éveil maintenant. Un petit frisson sur le côté de ton cou te fit légèrement sourire. Un rictus probablement visible qu'une seule seconde, mais il y avait quelqu'un. Dans ton appartement, il y avait définitivement une deuxième présence, à tes côtés, et très probablement très proche de toi. Tu te pinças les lèvres. Une autre question, vite, oui, mais laquelle ? Tu réfléchissais à toute vitesse, excité par ce qu'il se passait, peut-être qu'elle ne bougerait qu'une fois cette goutte, sur laquelle tes petits doigts fins étaient posés, mais ce n'était pas ton imagination, ni même ton inconscient qui la faisait bouger. Tu tentas de reprendre ton calme. Tu inspiras calmement, en dépit de ce qu'il se passait à l'intérieur de ta tête. « Pouvez-vous me voir ? »

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A peine eus je relâché sa tension que j'exerçais sur la goutte qu'elle revenait à son point de départ, au centre de la tablette de ouija. N'étant pas un habitué de ce genre de pratique, je m'étonnais à chaque. Les yeux ronds, je la suivais du regard. La goutte était comme attirée vers le centre sans pour autant pouvoir expliquer ce fait. Ce n'était pas comme si j'avais eu la volonté de la faire bouger cette fois-ci. Ce fait inexplicable relevait d'un mystère que même un esprit comme moi ne pouvait comprendre. Cependant, et grâce à ma triste expérience, je savais à présent que ce n'était pas la seule chose étrange présente en ce monde et ce vivant souhaitais peut être en apprendre plus sur la vie après la mort sans pour autant passer le cap que mes congénères et moi-même avions passé. Étais-je le mieux placé pour lui répondre? J'en doutais fortement. "J'peux rien pour toi mon gars..." Laissais-je échapper, me lamentant de mon inutilité. Même s'il ne pouvait pas m'entendre, je m'excusais de cette ignorance et incompréhension. J'avais tourné la tête pour m'adresser à lui, posant pour la première fois mon regard sur cet homme. Il semblait jeune, peut être avait-il mon âge, peut être celui que je devais avoir en vérité, si je n'avais pas trépassé.
J'estimais qu'il était temps pour moi de partir hélas, encore un fait inexplicable me retenait. Au moment où j'avais posé les doigts sur la goutte, je m'étais retrouvé attaché à cette planche mystérieuse. J'étais à présent dans l'incapacité de me levé, enchaîné à cette maudite tablette. Je n'eus même pas le temps de jurer qu'une seconde question s'éleva dans la pièce. "Aish! T'es con ou quoi?!" Fut la première réponse qui passa mes lèvres. Est-ce que je pouvais le voir? Mais qu'est-ce qu'il croyait? Que parce que nous étions morts on perdait l'usage de la vue? De l'ouïe aussi pendant qu'on y était, non? Je râlais. Mais qui était cet imbécile?! Ma main se posait sur la goutte, la faisant alors bouger. D'un mouvement bref, je la dirigeais vers une réponse. Non. Qu'est-ce qui m'empêchait de lui mentir? Rien. Ma main toujours posée sur la goutte, je remontais sur la planche pour argumenter, lui faire prendre conscience de sa bêtise dans ma réponse. Cependant, discuter avec le monde des vivants était quelque chose de plus compliqué qu'il n'y paraissait et je semblais avoir donné trop d'énergie dans ma réponse négative. Ma main se faisait alors tremblante, bougeant fébrilement la goutte vers les lettres. Elle indiquait en premier le J, suivant hasardeusement vers la prochaine lettre. E. Puis la suivante et ainsi de suite pour former une phrase approximative: J-E-N-T-E-N-P-A-N-O-N-P-L-U-S.  

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Après avoir prononcé ces mots, tu te sentis un peu bête. Mais après tout, si tu devais enquêter sur le monde de l'au-delà et l'existence potentielle d'une seconde vie après la mort, et bien tu devais poser des questions bêtes. Tu fermas les yeux quelques secondes, te rendant compte de la bêtise que tu venais de dire. Peut-être que tu n'aurais pas de réponses, peut-être que tu ferais fuir cet esprit à cause de ton manque d'expérience dans le domaine, ou même à cause de ce que tu étais. Un humain perdu, curieux, aux abords suicidaires. Et pas qu'un peu. Voilà ce qui te résumait grossièrement, mais tu savais que le fond était plus complexe que cela. Tu t'essayais à ne pas y penser, de ne pas te rendre compte de ta naïveté apparente. Généralement, tu ne l'étais pas vraiment, mais certains sujets avaient tendance à te rendre un peu différent. Ton regard fixait le vide en face de toi, comme si tu allais voir cet esprit qui venait de te répondre, comme si tu allais être capable d'apercevoir une forme ou même une silhouette distincte. Tu ne parvenais pas encore à savoir d'où venait cette présence, si elle était près de ton oreille, ou même assise non loin de ta cérémonie, si elle était dans le cercle de sel ou si elle devait l'éviter. Tu ne savais rien, mais ça viendrait.

Tu attendais patiemment la réponse, même si tes joues avaient rougi de honte. Et puis la goutte se mit à bouger, ce qui te stoppa dans ta réflexion. NON. Tu fronças les sourcils. Non ? Sérieusement ? Ton expression montrait que tu étais plus que perplexe quant à la réponse donnée. Pour toi, même si tu avais posé la question, c'était évident que les autres, les morts, pouvaient voir les vivants, contrairement à ces derniers bien évidemment. L'injustice était partout après tout. Pourquoi les gens comme toi, encore en chair et en os, ne pouvaient pas voir les esprits ? Etait-ce à cause de l'étroitesse du cerveau humain, ou bien à cause d'un voile invisible séparant les deux mondes ? Tu te posais, encore une fois, beaucoup de questions en seulement quelques secondes, mais d'un coup, tu t'arrêtas pour lire avec attention les lettres sur le Ouija et les assembler, tentant de comprendre ce qu'elles voulaient dire. Tes doigts toujours sur la goutte, qui redescendit presque automatiquement après le silence laissée par ces lettres gravées dans le bois, ne bougèrent pas. De toute façon, c'était interdit dans les règles du jeu. Il ne peut pas t'entendre ? Est-ce que cet esprit était en train de se payer ta tête ? Tu restas encore silencieux, parce que tu ne savais pas quoi répondre, quoi dire, mais contre toute attente, ce fut un son inhabituel qui sortit de tes lèvres. Tu venais de pouffer, te permettant ainsi un petit rire. En vérité, il pouvait bien se moquer cet esprit, tu étais juste content qu'il te réponde. Pour le coup, toutes tes réflexions étaient parties, tu avais juste envie de continuer cette séance, peu importe comment elle finirait et quand. Le sourire aux lèvres, indéniablement accroché, semblant ne pas vouloir s'en aller, tu regardas la planche avec intérêt. « Je note l'ironie dans votre réponse. Alors vous pouvez me voir, et m'entendre de votre côté ? C'est dommage que je ne puisse pas avoir le privilège de vous voir moi aussi. Est-ce que j'ai l'air d'un imbécile qui parle tout seul ? » Tu n'avais pas vraiment posé cette question à l'esprit, mais tu venais de te rendre compte que les monologues, ce n'était véritablement pas ton truc. Cependant, même si ce détail te frappait en quelque sorte, tu gardais cette petite lueur espiègle au fond de ton regard. Une expression que tu n'avais encore jamais eue auparavant. Comme quoi, il y avait des sujets qui te changeaient complètement.

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Je relâchais une nouvelle fois la goutte, cette dernière revenant automatiquement au centre de la planche comme attirée par un aimant. A la suite de cet échange, je décidais de m'installer un peu plus confortablement en tailleur, à l’extérieur du cercle de sel. C'est que je n'étais pas en mesure de le passer pour me rapprocher. Quel garçon stupide! Pensait-il à mon confort? Ce n'était pas pratique de devoir à chaque fois se pencher pour répondre à des questions plus stupides les unes que les autres! Cependant ce garçon semblait avoir de l'humour puisqu'il compris ma plaisanterie. A peine eut-il commencé à me parler que je poursuivait, lui répondant presque automatiquement. Oui. C'était tellement frustrant de ne pas pouvoir parler distinctement avec quelqu'un! Devoir interagir avec ce genre d'objet mystique était quelque chose de fatiguant autant pour moi que pour le vivant qui l'utilisait. Lié à elle comme par "magie", je drainais l'énergie de celui qui l'utilisait, me fatiguant davantage pour réussir à avoir un semblant de conversation qui se faisait hélas presque qu'à sens unique.
Je relâchais à nouveau la goutte pour enfin répondre à sa deuxième question, orientant faiblement l'objet jusqu'à la réponse que je souhaitais lui donner. Oui. Je ne pus cependant m'empêcher d'asséner un petit rire moqueur. Si je faisais encore parti du monde matériel, je me serais sans aucun doute moqué de ce genre d'individus. De mon vivant, je trouvais ce genre de théorie complètement délirante et inutile. Je ne comprenais pas pourquoi des gens souhaitaient des réponses au sujet de ce qui pouvais les attendre après la mort. A moins que ce garçon cherchait à communiquer avec quelqu'un en particulier? Je me mordais la lèvres inférieure, réfléchissant un instant avant de me décider à agir. Mes doigts à nouveau posés sur la goutte, je la dirigeais vers des lettres. K-E-S-T-U-V-E. Lui demandais-je alors. Pas que j'avais envie de lui donner mais plutôt pour comprendre et peut être jouer un peu avec lui?  

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Plus tu parlais, et plus tu entendais ta voix. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, parler est une chose normale pour la plupart des gens, mais pas pour toi. Tu n'entendais que très rarement ce ton dans ta gorge, il n'était plus vraiment hésitant, non, au contraire, tu paraissais presque à l'aise. Plus qu'avec les vivants en tout cas. Il était clair que tu avais une attirance pour les faits étranges et morbides de la vie, mais tu ne cherchais pas à être populaire. Tu suivais juste ce qui te plaisait, ce qui te donnait envie de sourire et d'en faire toujours plus. Après tout, c'est cette folle passion qui t'avait conduit à faire cette séance de Ouija, tu ne pouvais rien regretter. Il n'empêchait que le fait de t'écouter parler tout seul, comme un fou, te faisait une drôle de sensation. Tu n'étais pas certain de vouloir partager ce genre d'expériences avec quelqu'un d'autre, trop jaloux, trop possessif de tes découvertes, mais l'idée que ce soit un secret était encore plus excitante. Aux questions que tu posas, l'esprit répondit rapidement, même si encore une fois, tu avais l'impression de trop parler, n'étant pas habitué à le faire. Tu hochas la tête lorsqu'il te confirma qu'il te voyait et t'entendait, même si tu le savais plus ou moins déjà.
Ton sourire s'agrandit davantage au deuxième OUI. Parce que tu avais l'avis de quelqu'un qui te regardait, qui était mort et qui tentait une conversation avec toi. Un sentiment étrange t'envahit alors. Une sorte de chaleur en dépit de la situation actuelle. Il n'y avait rien de chaleureux, ou de quoi que ce soit qui pourrait te réchauffer. Cependant, tu avais l'habitude de ressentir l'effet inverse des personnes ordinaires, parce que tu étais différent depuis bien longtemps, tu en avais pris conscience.
La fois suivante, ce fut l'esprit qui te posa une question, et il te demanda ce que tu voulais. Un petit soupir répondit aux lettres gravées sur la planche, alors que tes petites épaules se soulevèrent instinctivement. Cette question recevait toujours la même réaction chez toi. Tu ne savais pas vraiment pourquoi tu faisais ça, ou peut-être qu'il y avait bien quelque chose ... Ton visage se baissa un peu plus, comme si tu avais peur que l'on te rejette, que l'on te juge, mais tu étais en train de converser avec un esprit, il ne pouvait pas faire ça, pas vrai ? « Je veux savoir ce qu'il y a de votre côté ... Avant de mourir. » Tu restas figé sur place, dans l'attente d'un jugement verbal qui ne viendrait pas, d'un regard de travers que tu ne verrais pas. « Ah ! Est-ce que vous pouvez entrer dans le cercle de sel ? »

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Un silence s'installait dans la pièce. J'avais comme l'impression que le garçon réfléchissait, ne sachant pas quoi me répondre. Pourtant ma question me semblait simple. Pourquoi il avait décidé de jouer avec cette maudite tablette? Pourquoi il avait prit la peine, seul, de se faire drainer son énergie pour pouvoir communiquer avec un monde qu'il n'était pas capable de voir? Beaucoup dans son cas le faisaient par insouciance, pour "jouer" avec des forces qu'ils ne maîtrisaient pas ou pour tenter de voir si des membres disparu de leur cercle étaient encore parmi eux. A cette idée, je me pinçais les lèvres. Est-ce que quelqu'un proche de moi essayerai de me contacter de la sorte? L'idée commençait à me déplaire, à me déprimer. Et si je manquais quelque chose? Et si je n'étais pas au bon endroit, au bon moment... Un soupire passait mes lèvres alors que je regarder cet être avec envie.
Le silence fut brisé par ses lèvres. Enfin, il me répondait me faisant rouler des yeux. Il n'y avait rien d'intéressant après la mort. Cependant, ce fut sa question qui m'intrigua. Mes yeux se baissaient sur le cercle de sel. Devais-je dire ou non la vérité? Ma main lâchait la goutte cette dernière reprenant son manège habituel. A nouveau, un silence s'installa mais cette fois-ci, ce fut ma faute. Ma main pouvait passer mais il m'était impossible de pouvoir m'installer juste à côté de lui, là où j'aurais pu me hisser à un pied d'égalité le temps de sa séance, nous faisant alors oublier nos différences. Les lèvres pincées et fébrilement, je dirigeais mon bras vers la goutte pour à mon tour "briser" ce silence. Non.

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C'était vrai. Tu te languissais de savoir ce qu'il y avait après, si le monde tournait de la même façon, si les couleurs étaient celles que tu voyais aussi. Tu étais ignorant, parce que, encore vivant, mais tôt ou tard, tu passerais le voile toi aussi. Tu voulais mourir, tu planifierais sûrement le jour de ta mort dans les moindres détails, mais pour le moment, tu te contentais de récolter des informations. C'était plutôt important. Après ce qu'il t'était arrive, tu trouvais cet intérêt morbide normal. Quoi qu'un peu décalé. Tu ne laissais pas tes secrets intimes sortir de ta bouche maintenant, après tout, tu ne savais pas à qui tu parlais. Il y avait bien des milliers d'esprits malfaisants de l'autre côté, il était possible que celui qui communiquait maintenant avec toi, ne soit pas un bon esprit. Tu gardais cela dans un coin de ta tête, même si à part une présence étrangère, tu ne ressentais en aucun cas des sentiments néfastes. Tu ne connaissais peut-être pas les effets d'une séance de ouija, ou peut être à moitié, mais peu de choses te faisaient peur, alors tu pouvais, en quelque sorte, y aller sans craintes. Empruntant un chemin de conversation désagréable et plutôt triste, tu changeas sans détour de sujet. Subtilement tu lui tirais des informations. Sans doute, ta gentillesse à toute épreuve te permettait de t'inquiéter pour quelqu'un de déjà mort, mais tu devais aussi savoir si le cercle de sel était utile. Par précaution, tu l'avais placé, sans trop y croire d'ailleurs.

Tu patientas quelques instants, en te demandant si tu n'avais pas froissé l'esprit dans la pièce. Tu te permis d'espérer le voir, ne serait-ce qu'un nuage léger et presque invisible ou quelque chose, mais seules les ombres des flammes de bougies vacillantes dansaient et créaient des formes sur les murs et les meubles. Tu étais d'un naturel distrait, un rien te dirigeait sur une autre voie, et là encore, tu te perdais dans tes propres pensées. Tu te redressas droit comme un piquet quand la goutte se mit à bouger de nouveau, mais cette fois vers une réponse négative. Tu te pinças les lèvres. Est ce que c'était inconfortable pour lui? Est ce que ça lui faisait mal ? Quel genre d'effets du simple sel pouvait avoir sur un esprit. Là était le grand mystère. « Est ce que c'est douloureux pour vous ? »

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Je pensais que suite à ma réponse il me congédierait cependant ce ne fut pas le cas. Il continuait ses questions. D'abord étonné, je le regardais. Et si je lui disais que c'était douloureux, retirerait-il le sel? J'esquissais un sourire en coin. Autant essayer, non? Ma main le guidait alors vers une réponse. Oui. Cependant, je m'arrêtais pas là. Malgré le peu d'énergie que je recevais de lui, je m'efforçais de faire une phrase complète. Peut être que si ce vivant savait que je pouvais potentiellement souffrir, il aurait la bonté de m'offrir plus de confort et la sensation d'être sur un pied d'égalité avec lui?
Je guidais donc la goutte vers les lettres, d'abord le P puis le E, le U et enfin le T. Je n'étais pas certain de l'orthographe, ne n'avais jamais été bon élève puisque je ne prenais pas la peine d'étudier. Bien que je n'en avais conservé aucun souvenir, je m'en doutais à moins qu'une fois être passé de l'autre côté on m'avait prit plus que mes souvenirs. Drôle de théorie! Après avoir fait une pause sur la lettre "T", je poursuivais vers le U ce qui fut facile puisqu'il était juste à côté. Pour le L en revanche c'était plus compliqué, la goutte se bloquait parfois signe que j'avais du mal à la guider mon énergie s'affaiblissant. Ce fut au tour du E. C'était encore plus compliqué et plus fatiguant pour moi cette lettre étant si loin. Une fois dessus, je m'arrêtais quelques seconde. J'avais besoin de plus de force. Il fallait impérativement qu'il le retire même si après cela il se sentirait vidé c'était le prix à payer pour discuter avec un mort. Je sentais que je n'allais pas réussir à continuer ma phrase si cela continuait, je n'en voyais plus le bout et pourtant, je repris ma route, lentement, fébrilement et de plus en plus faiblement. R-E-T-I-R-E-R.

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Et si ça l'était alors quoi? Tu retirerais inconsciemment le cercle, tu détruirais le seul moyen de te protéger ? Tu ne savais pas, mais si tu le faisais souffrir de cette façon, alors sans doute que tu ne devrais pas le retenir ici. Les réponses que tu avais obtenues étaient entièrement suffisantes, tu pourrais immédiatement te réjouir de ce que tu avais appris. C'était déjà un énorme point pour toi que d'avoir eu un esprit, bien que malin, coopérateur. La goutte bougea vers le oui et ton cœur s'emballa. Tu n'aimais pas faire du mal aux autres, en dépit de ce que l'on t'avait fait traverser, tu ne pouvais tout simplement pas être méchant. Tu fronças les sourcils en constatant qu'il avait grand mal à déplacer la petite goutte. Toi, tu ne faisais rien à part la tenir et tu ne te fatiguais donc pas, mais peut-être que pour lui, de son côté, les choses étaient différentes. Y avait-il une contrainte à communiquer avec les vivants pour les esprits ? Tu le pensais sérieusement en continuant de regarder la faible énergie qui se dégageait à présent dans l'objet spirituel. Cependant plus les lettres apparaissaient dans la loupe, plus tu semblais perplexe. Est ce que tu le retirerai ? Ou pas ? Tu n'étais pas complètement fou et tu ne pouvais faire cela.
« Comment puis-je vous faire confiance ? » À vrai dire, seul un perturbé ferait confiance à quelqu'un d'invisible, mais tu serais prêt à le faire, juste parce qu'une force dont tu ne connais absolument rien, te le demande? C'était beaucoup moins sûr. « Si vous me donnez une information sur vous alors... Peut-être que je pourrai vous aider. »

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Au moment où je lâchais la goutte, le venait se replacer au centre de la planche avec une facilité déconcertante. Pour moi qui avait peiné à lui écrire une misérable phrase j'enviais cette force mystique qui me semblait inépuisable. Je soupirais, agacé. Je me sentais si impuissant et dépendant de ce vivant pour redoubler de force. Ses mots qui précédèrent ma requête eurent quant à eux le don de m'énerver. Lui qui avait posé des questions si stupides précédemment, il semblait commencer à retrouver une conscience. Evidemment qu'il ne fallait pas me faire confiance! Il ne fallait croire aucun esprit d'ailleurs! Ce n'était pas sorcier à deviner et le premier imbécile devait s'en douter. Dommage pour moi, ce garçon qui semblait être le roi des idiots ne dérogeait pas à la règle. Cependant, il me demandait en échange une preuve de ma bonne foi. Une information? Qu'entendait-il par là? Je me pinçais les lèvres, le regardant quelques instants. Pouvais-je lui faire confiance moi aussi? A vrai dire, je n'avais rien à perdre, moi. Cependant, communiquer avec lui me demandait beaucoup trop d'effort dans ce genre de circonstance. J'avais besoin de me rapprocher de lui, de plus prendre un peu plus d'énergie vitale, assez au moins pour continuer de lui répondre, à moins qu'il veuille me congédier car lui seul le pouvait à présent. C'était une chose trop fastidieuse à expliquer à quelqu'un qui ne pouvait pas comprendre. Je soupirais à nouveau. Les mains posées sur la goutte, je poursuivais la séance, le guidant vers les lettres, espérant que cette fois il s'exécute sans poser d'avantage de question du moins, pas temps qu'il n'aurait pas détruit ce cercle. Fébrilement, je faisais bouger la goutte d'abord vers le N. Comme précédemment, j'avais du mal à la déplacer vers le A c'est que ces lettres n'étaient pas l'une à côté de l'autre, pareil pour le R. Cependant, je venais de lui donner mon identité alors peut être qu'il ferait quelque chose en retour pour moi...

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nar & aedan

Tu attendais une réponse. N'importe laquelle, puisque ce devait être quelque chose que lui seul serait capable de ressortir si jamais vous aviez l'occasion de vous recroiser à une autre séance de ouija. Tu ne comptais pas t'arrêter là, même si tu savais que c'était dangereux, tu n'avais pas peur de mourir, ni même de souffrir. Ces sentiments humains effacés te donnaient une certaine liberté, un goût unique de la vie. Te poussant parfois inconsciemment en danger, mais tu ne t'en rendais jamais compte. Bien loin d'être totalement stupide cependant, tu réfléchissais au fait de retirer ou non la barrière de sel que tu avais placée en guise de précaution. Le fait était qu'elle fonctionnait, et c'était plutôt remarquable. Les livres disaient vrai, et certains films reprenant souvent le sel en guise de protection spirituelle étaient partiellement véridiques. Tu étais plutôt content de ce que tu découvrais. Après tout, qui pouvait se vanter d'avoir tes informations? De plus, tu avais cet esprit avec toi, et pour le moment, il ne te semblait pas néfaste. Il y avait tout de même trop de simplicité dans l'échange et tu restais sur tes gardes. Peut-être essayait il de te duper. Tu reportas à nouveau ton attention sur la goutte qui bougeait péniblement sous tes doigts. NAR. Nar ? Tu fronças les sourcils sans comprendre ce que cela signifiait. Tu ne pouvais pas être sûr de ce que cela voulait dire mais il semblerait que le sel soit assez casse-pieds pour que l'esprit te donne un petit quelque chose sur lui. Tu restas silencieux quelques instants, avant de décider qu'il était temps d'arrêter cette "conversation". Après tout, tu avais suffisamment jouer avec le monde des morts pour aujourd'hui, tu avais plutôt intérêt à ne pas traîner. De plus, tu ne faisais pas totalement confiance à ce dernier mot, et tu ne voulais pas le retenir ou le faire souffrir davantage. « Merci d'être venu, de m'avoir répondu. » C'était le moins que tu puisses faire, ces mots étaient sincères. « J'espère que nous aurons l'occasion de communiquer plus longtemps la prochaine fois. D'ailleurs... Si vous revenez, je retirerai peut-être le sel. » Un petit sourire rehaussa tes lunettes sur ton nez alors que ton accent coréen tranchait ton anglais avec une aisance plutôt folle.

Avant de prononcer les mots qui couperaient votre communication, tu relevas tes yeux timides devant toi, sans savoir où regarder et quoi visualiser exactement. Une petite lueur triste peignit quelques secondes tes iris gris, sans doute une émotion qui allait parfaitement avec cette couleur, et finalement, avec les paroles adéquates, tu coupas le lien. Un soupir passa tes lèvres. Était-il encore là, quelque part? Tu fixa la goutte comme si elle allait bouger de nouveau, mais jusqu'à la prochaine séance, elle restera ainsi, sans vie. Reprenant tes esprits, tu rangeas le tout rapidement pour remettre de l'ordre à la pièce et changer l'atmosphère. Tu allais noter ces précieuses informations, il ne fallait pas que tu oublies.

first time
nar & aedan

J'attendais une réponse, un mouvement de bras ou même un battement de cil mais il n'en était rien. Un silence, plus pesant que précédemment s'installait. Il semblait réfléchir. Allait-il retirer le sel ? Lorsque le silence fut brisé par les soins du garçon, je m'étonnais de sa réponse. Les yeux ronds, je le fixais. "Il est sérieux là?!" Sifflais-je entre mes dents. J'avais l'impression que ce garçon venait de me trahir. J'avais accéder à sa requête en lui donnant mon prénom. Quoi de mieux pour gagner sa confiance et lui, lui devant de piétiner mon effort qui m'avait semblé insurmontable. J'étais épuisé, j'avais besoin de sa force au moins en remerciement pour mes réponses. Les dents serrées, je lui lançais un regard assassin qu'il ne pouvait hélas pas percevoir. Complètement impuissant, je ne pouvais même pas le bousculer ni le frapper ou même lui faire peur en interagissant avec d'autres objets environnant. Effectivement, bien trop affaiblit pour cela, je n'étais rien si ce n'était un être à présent indésirable dans cet appartement qui me semblait bien trop grand pour une seule personne. "Attend voir! Tu vas payer, connard!" grognais-je à nouveau.
Bien qu'il ne me souhaitait plus en ce lieu, qu'il m'avait libéré de cette maudite planche, je n'allais pas me priver pour faire mon nid ici et partager ce lieu avec lui, qu'il le veuille ou non. Je me levais pour m'écarter de cette planche, m'installant confortablement dans son canapé. C'est qu'il était confortable en plus! Avachit, je passais ma main dans mes cheveux tout en balançant ma tête en arrière. "T'as l'air con à r'garder dans l'vide!" Grognais-je amèrement en lui lançant un regard de travers, m'installant un peu plus confortablement dans son canapé, les pieds sur le coussin du divan. Pas d'race pour les gens de cette espèce!